Dans l’intimité du général de Gaulle

Correspondance et documents adressés à Paul Péraldi, Intendant militaire, compagnon de la Libération, proche du Général et de sa famille depuis la seconde Guerre mondiale

 

Charles de Gaulle (1890-1970), général, président de la République et écrivain. Correspondance adressée à l’intendant militaire P. Péraldi et à sa femme, de 1947 à 1964. 11 lettres et cartes de visites signées (dont 3 autographes), 1 lettre autographe signée de son épouse Yvonne, 1 carton d’invitation et 2 documents.   

Paul-Henri Péraldi (1903-1964), ancien FFL, proche collaborateur du Général, fut chargé de l’intendance à son état-major, rue Saint-Dominique. Les de Gaulle lui confièrent la direction du chantier de reconstruction de la Boisserie. La demeure avait été mise en vente publique en 1940, dès la condamnation à mort du Général ; faute d’acheteurs, elle avait été ouverte aux réfugiés puis aux troupes allemandes. Elle est laissée très délabrée en 1944. Péraldi fut ensuite nommé plusieurs années intendant militaire des troupes coloniales au Dahomey puis au Tchad.

Intéressante correspondance avec un de ses proches collaborateurs, dans laquelle, tout en remerciant à de nombreuses reprises Péraldi pour ses vœux de nouvelle année ou pour lui avoir souhaité sa fête,  

De Gaulle. Lettre autographe signée.

    •   le Général traite les communistes de fascistes et entrevoie la création du RPF : « 47 sera l’année des échéances pour les fascistes qui s’étaient pris pour des valeurs. C’est seulement après leur dégradante faillite qu’on pourra bâtir quelque chose. Les choses vont d’ailleurs assez vite» (4 janvier 1947) ;
    • il s’excuse le 21 janvier 1953 et de ne pas lui avoir répondu plus tôt « pour la raison que vous savez». [Le 8 janvier, le gouvernement Pinay ayant chuté, René Mayer avait été nommé président du Conseil des ministres. Les gaullistes du RPF lui avaient apporté leurs voix lors de son investiture] ;
    • il rappelle le 13 juin 1953 les glorieux faits d’armes au Tchad pendant la guerre à l’occasion de sa nomination dans ce pays. « Je connais vos sentiments et je suis certain que vous saurez entretenir autour de vous le souvenir des glorieuses années du Tchad. » [Allusion à la colonne de Leclerc formée au Tchad dès 1940] ;
    • le 14 novembre 1956, il lui confie à demi-mots son optimiste quant à son retour au pouvoir : « Il est vrai, par ailleurs, que la situation du pays n’est pas brillante. Mais vous avez raison de garder confiance malgré tout, car bien des indices permettent de penser que le réveil national est proche.»  Il fait sans doute allusions aux manifestations provoquées par les troubles en Algérie et la situation budgétaire dramatique qui en découle, ainsi qu’aux violentes manifestations anticommunistes à Paris pour protester contre l’intervention soviétique en Hongrie (le 7 novembre) ;
  • et enfin, le 13 janvier 1964, le Général adresse à l’épouse de son fidèle intendant une lettre de condoléances lors de son décès « Vous savez l’amicale estime en laquelle je tenais l’Intendant Peraldi. Elle était née à l’époque de la France Libre et les années n’avaient fait que l’affermir. C’est vous dire de quel cœur je prends part à votre si grand chagrin. »

Yvonne de Gaulle, l’épouse du Général considérait même Péraldi comme un familier du couple ; comme en témoigne la longue lettre qu’elle lui adresse le 16 octobre 1948 dans laquelle elle annonce la naissance rocambolesque de leur petit-fils Charles : « Vous avez su sans doute que nous avons eu un petit fils : Charles, le 25 septembre. Il a manqué naître dans le train. Ses parents s’amenaient à Paris pour l’évènement prévu vers le 10 octobre d’après le grand Manitou qui devait présider ! en fait, il a fallu descendre à Dijon et le bébé est né à la Maternité. Tout a d’ailleurs bien été, mais nous avons été un peu suffoqués le Général et moi en recevant le coup de téléphone de notre fils, nous annonçant ce changement au programme ! » ; puis elle lui donne des nouvelles de sa fondation Anne de Gaulle au château de Vert-Coeur pour les enfants trisomiques dont Peraldi avait supervisé les travaux d’aménagement : « Vertcoeur va très bien, aussi bien que possible ; bien que le prix de la vie s’élève en flèche ce qui me cause quelques soucis, l’assistance Publique ne suivant le mouvement qu’avec le retard “administratif” », ainsi que de la Boisserie : « A Colombey il y a toujours de l’eau dans la cave ; le “hurloir“ est trop froid décidement pour y mettre autre chose que des archives et des provisions ou matériel. » [Le Général nommait le « hurloir » la pièce où jouaient ses petits-enfants].

 

Avec

2 faire-part de mariage, un de chaque famille, d’Elisabeth de Gaulle, la fille du Général, avec Alain de Boissieu de Luigné, janvier 1946,

et, au nom de Péraldi, un carton d’invitation à dîner chez le Général, le mardi 24 juillet 1945 à 20 heures 30 au 4, Route du Champ d’Entraînement. Bois de Boulogne. Paris XVIe (près de la Grille de Madrid).

 

 

Sont joints également, 15 courriers adressés à Peraldi :

7 lettres (dont une Madame Péraldi) et cartes de Gaston de Bonneval, ordonnance du Général, ami fidèle de l’intendant : « J’aimais et appréciais votre mari que je connaissais depuis près de vingt ans – comme le temps passe ! » (11 janvier 1964) dans lesquelles sont évoqués de Gaulle ainsi que les évènements français ou internationaux : « Cher ami, suite n’a pas été donnée à mon projet, le gal de gaulle s’étant surement et simplement installé à Matignon où la maison était toute montée » [Le Général s’installe à Matignon où il préside le premier conseil des ministres le 9 septembre 1944]. Paris, 24 juin 1948 : « Le Général et Madame  de Gaulle ont été très sensibles au témoignage que vous leur avez fait parvenir au moment de la mort de leur petite Anne. Je leur ai fait la commission dont vous m’aviez charge et ils me prient de vous en remercier. Je suis navré de ce que vous me dîtes de votre état d’esprit et de celui qui règne à Cotonou, malheureusement dans toutes les colonies cela a toujours été ainsi. C’est à vous qui arrivez de France qu’il appartient de redresser le mouvement. » Paris, 4 juin 1953 : « Je me réjouis que vous soyez à Fort Lamy, centre gaulliste par excellence. L’ambiance que vous y trouverez sera certainement très sympathique d’après ce que j’ai pu voir en y passant moi-même. » 8 août 1954 : « La situation en France est navrante. Le pays s’en fout. Il est bon à recevoir des coups de pieds au c… Nous sommes très attristés et très inquiets. Cette histoire de C E D est criminelle. » [La Communauté Européenne de Défense (CED) était un projet de création d’une armée européenne, avec des institutions supranationales, placées sous la supervision du commandant en chef de l’OTAN, qui était lui-même nommé par le président des États-Unis. Dans le contexte de la guerre froide, le projet, qui est esquissé en septembre-octobre 1950, ne devient un traité, signé par 6 États, que le 27 mai 1952. Ratifié par la République fédérale d’Allemagne, la Belgique, le Luxembourg et les Pays-Bas, le traité instituant la CED sera rejeté par l’Assemblée nationale française le 30 août 1954 par 319 voix contre 264. De Gaulle s’était violemment opposé à ce traité]. En 1958, à l’occasion du rappel au pouvoir du Général : « Encore une étape de franchie pour le général et la France ».

2 lettres dactylographiées, datées de 1957, signées Georges Pompidou, alors employé par la banque Rothschild. L’intendant est en recherche d’emploi. Pompidou et lui avaient fait partie du cercle rapproché du Général, appartenant tous deux à son cabinet dès la Libération ; les démarches du futur président auprès de la Banque de France en faveur de Péraldi restent malheureusement vaines. « Encore une fois, je suis à votre disposition pour de nouvelles interventions. De mon côté, je continue à chercher, mais il est certain que les postes du type de ceux qui peuvent vous convenir sont particulièrement rares et que ce sont ceux pour lesquels il y a le plus de candidats. »

6 lettres ou cartes d’officiers de haut-rang : ● amiral Paul Ortoli (1 carte et une lettre) ; ● général de division François Ingold, compagnon de la Libération, alors commandant de la Brigade Niger-Dahomey (2 lettres et une carte de visite autographes signées) : « avec un très amical souvenir à l’ancien du temps de la France libre » (Niamey, le 3 janvier 1950) ;  « Le Cameroun-Paris sont déjà loin… [Il avait participé à la campagne de Leclerc]. Mais comme vous écrivez, nous avons encore devant nous des réalisations nombreuses à entreprendre – et je suis heureux de les entreprendre avec vous. Merci de votre fidèle souvenir et soyez assuré de mes sentiments d’ancienne camaraderie. » (Niamey, le 20 août [1950]) ; « les difficultés de logement s’aggravent… Mais nous y arriverons malgré tout » ([Niamey], le 25 septembre [1950] ; ● Gaston Palewski, ambassadeur, ministre d’État puis président du Conseil constitutionnel : formule des vœux « pour le triomphe d’une cause [le gaullisme] qui nous est chère et [à] laquelle depuis longtemps vous vous êtes voué » (Paris, le 26 janvier 1950). Palewski était resté très proche du Général, avec qui il avait fondé le RPF en 1947.

Avec un carton d’invitation aux obsèques nationales du Général Leclerc qui auront lieu le lundi 8 décembre, à 10 heures, à Notre-Dame. Carton rose, bordure de deuil, recto seul. Dim.  11,5 x 18 cm. Avec la mention imprimée : « Invités familles ».

Et les brevets de décorations de l’intendant Paul Péraldi : 

    • Médaille coloniale avec agrafe Afrique Française Libre. Brazzaville, 1er juillet 1944. [déchirures sans manque].
    • Membre des Forces Françaises Libres. 1er septembre 1945. [Déchirures marginales sans manque].
    • Officier d’Académie. Paris, 18 mars 1947.
    • Médaille commémorative des services volontaires dans la France libre. Paris, 30 août 1947.
    • Ordre de l’Etoile Noire. Paris, 28 novembre 1947. Avec courrier du Ministère informant de sa nomination, Paris, le 30 juillet 1947.
    • Légion d’Honneur. Paris, 4 novembre 1948, signé par Vincent Auriol.
    • Ordre du Nichan-el-Anouar. Paris, 15 juin 1953.

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