[Henri, comte de Boulainvilliers]. Mémoire contenant les moyens d’establir le droit d’amortissement des gabelles ; et de convertir le revenu des aydes en droit de Bouchon ; avec les avantages que le Roy, & ses sujets en peuvent retirer. Manuscrit in-8° de 3 ff. blancs, titre, 1-148, 2 blanches, 149-210 pp., 3 ff. blancs. Maroquin vert sombre fin XVIIIe, dos à 5 nerfs orné, pièce de titre en maroquin vert, armes dorées sur les plats dans un triple filet doré d’encadrement, roulette dorée sur les coupes et les chasses, tranches dorées.
Élégant manuscrit, d’une écriture ronde et lisible, entièrement margé de ce fameux écrit économique précurseur proposant une réforme hardie du système financier du royaume sous Louis XIV.
Le comte de Boulainvilliers (1658-1722), bien qu’ayant beaucoup écrit, n’avait rien fait imprimer de son vivant. Publié posthumément en 1727 avec cinq autres mémoires sous le titre générique de Mémoires présentés à Mr le duc d’Orléans régent de France, contenant les moyens de rendre ce royaume très puissant et d’augmenter considérablement les revenus du roi et du peuple, notre Mémoire fut vraisemblablement adressé en 1687 ou 1688 à Le Pelletier, successeur de Colbert au contrôle général des finances, précédant ainsi le Détail de la France de Boisguilbert paru en 1695 et le fameux Projet d’une dîme royale de Vauban dressé en 1700 et publié en 1707. Il s’agit donc du premier projet de réforme adressé aux environs de la Révocation de l’édit de Nantes au successeur même de Colbert, dans laquelle Boulainvilliers s’oppose aux taxations arbitraires, à la gabelle et au désordre des finances publiques, tout en proposant la transformation des gabelles en un impôt direct établi par tête et par classes de contribuables (capitation qui sera établie sous Pontchartrain en 1695), la mise en régie des impôts, la diminution, voire la suppression intérieure des droits de douanes, l’instauration de l’impôt sur le revenu sous le nom de droit d’amortissement en lieu et place des gabelles, la conversion des droits d’aides en droit de bouchon payé par les cabaretiers, et la reconversion des employés dans la gabelle en commerçant, soldats ou laboureurs, voire en colons dans les colonies des Amériques.
Indépendamment des idées qui abondent, presque toutes hardies pour l’époque, ce Mémoire est rempli de faits, de renseignements sur les prix et sur les frais, de chiffres, de dénombrements ; les débitants de boissons, les officiers et gens de service, les diocèses et les paroisses, les chefs de famille et les fortunes privées, les Etats et leurs revenus publics, y compris les revenus des souverains de l’Europe, y dont dénombrés ou évalués.
Exemplaires aux armes de Louis-Charles de Machault d’Arnouville (1667-1750), membre du Grand Conseil en 1690, maître des requêtes de 1694 à 1718, puis Lieutenant général de police de Paris jusqu’en 1720, année durant laquelle il fut directeur de la Librairie, enfin Conseiller d’Etat ; il fut commissaire chargé de la régie de la Compagnie des Indes et présida le Bureau du commerce de 1744 à 1750. Il fut par ailleurs chef du Conseil de son altesse royale, madame la duchesse d’Orléans, épouse de M. le Régent. Son fils, Jean-Baptiste de Machault, comte d’Arnouville, sera Contrôleur général des finances de Louis XV.
Voir Théophile Ducrocq, Le Mémoire de Boulainvilliers sur le droit d’amortissement des gabelles et la conversion du revenu des aides, antérieur au « Détail » de Boisguillebert et à la « Dîme royale » de Vauban, Poitiers, Tolmer, 1884.
Armes : O.H.R., pl. 2153 ; J. Guigard, Armorial, t. II, p. 333.
Bel exemplaire d’une rare copie manuscrite.
3 500 €