Hector Berlioz (1803-1869). III. Symphonie Héroïque. Épreuves avec les corrections autographes du compositeur. Sans lieu ni date [ca. 1862]. 10 pp. in-8° contrecollées sur feuillets in-4° montés sur onglets. Relié anciennement à la Bradel en un cartonnage rouge à la cuve avec une pièce de titre en maroquin noir au plat supérieur.
Berlioz s’est servi de l’édition de son Voyage musical en Allemagne et en Italie. Études sur Beethoven, Gluck et Weber. Mélanges et Nouvelles, publié en 1844 chez J. Labitte à Paris, tome I, pp. 279 à 288. Cette « étude analytique » consacrée à l’Héroïque, sera reprise, avec les corrections notées à l’encre, sous le titre d’« étude critique des symphonies de Beethoven », dans À travers Champs, Études musicales, adorations, boutades et critiques par Hector Berlioz, chez Michel Lévy Frères, Paris, 1862, chapitre III, pp. 20 à 26.
Le compositeur a déchiré, parfois maladroitement, puis collé chaque page de l’édition de 1844, recto puis verso, et a noté ses corrections à l’encre sur la page même, débordant souvent sur le feuillet de support.
Certaines corrections sont d’un seul jet : « Seulement on peut se dire : pourquoi ce désespoir ? pourquoi cette rage ? on n’en découvre pas le motif. » (p. 2), d’autres présentent quelques hésitations : « On conçoit quel étrange effet cette mélodie [basée sur les trois biffé] formée des trois notes de l’accord de tonique doit produire contre les deux notes dissonantes de l’accord de dominante […] » (p. 3) ;
« à quel point de vue que l’on se place, [il faut convenir biffé] si c’est là réellement une intention [que ce caprice, si c’en est un réellement biffé] de Beethoven, et s’il [n’y a pas plutôt une faute biffé] y a quelque chose de vrai dans les anecdotes qui circulent à ce sujet, il faut convenir que ce caprice est une [véritable biffé] absurdité. » (p. 3). A noter, p. 8, la correction « d’une création surhumaine » en « d’une si noble composition », ainsi que la suppression de « pour Napoléon, à coup sûr, elle [la musique] n’existait pas », pointe dans l’air du temps de la Monarchie de Juillet peu en accord avec L’Impériale, hymne en l’honneur de Napoléon III, qu’il avait composée pour l’Exposition universelle de 1855.
Berlioz écrivait dans Les Grotesques de la musique : « Beethoven est un Titan, un Archange, un Trône, une Domination. Vu du haut de son œuvre, tout le reste du monde musical semble lilliputien. Il a pu, il a même dû paraphraser l’apostrophe de l’Évangile, et dire : “ Hommes, qu’y a-t-il de commun entre vous et moi ? ” »
« Héritier présomptif » du maître de Bonn, comme l’avait qualifié Liszt, Berlioz aurait confié à Fétis : « J’ai repris la musique au point où Beethoven l’a laissée », composant sa Symphonie Fantastique en réponse à l’Héroïque.
Les révisions autographes de son analyse, alors au sommet de son art, n’en ont que plus de valeur.
A noter quelques notes manuscrites à l’encre d’une autre main, probablement de l’imprimeur : « Hèques [?] » et « Letellier », et d’autres au crayon gris, dont « 1-68, 15 surch[arges ?] »
Quelques frottements à la reliure.
Document exceptionnel.
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