Henri IV abjure le protestantisme et accorde une trêve à la Ligue. Leçon de réalisme politique.

Henri IV. Signature autographe

 

Henri IV (1553-1610), Roi de France. Lettre signée, Saint-Denis, 1er août 1593, à  Monsieur d’Abin, chevalier des ordres, conseiller en son conseil d’État et capitaine de cinquante hommes d’armes de ses ordonnances, gouverneur et lieutenant général en son pays de la Marche ; contresignée par Pierre Forget [alors secrétaire des commandements du roi]. 1 page in-folio, adresse au verso. (Petite mouillure brune à la marge gauche sans atteinte au texte).

Exceptionnelle lettre à propos de son abjuration du protestantisme (le 25 juillet à Saint-Denis), et de sa trêve avec la Ligue (signée à La Villette le 31 juillet).

Henri IV rassure le comte d’Abin quant à sa charge concernant les prétentions de son neveu le comte de Clermont, et il veut que ce dernier « restablisse ce qui y a esté entrepris pour le faict du chateau d’Aubusson » [place forte protestante depuis 1575].

Henri IV. Abjuration.

Il l’informe de sa conversion au catholicisme : « Je vous ay cidevant faict une aultre depesche pour vous donner advis de ma conversion en la Religion Catholique » ainsi que de la trêve de trois mois qu’il a accordée ;

Henri IV. Trêve. 1593.

il lui demande de la faire publier et de faire observer soigneusement « les articles de la tresve generalle que jay accordee pour trois mois, vous advisant de la faire publier promptement par toutes les villes de vostre gouvernement, et la faire songneusement observer ». Il espère ainsi s’acheminer vers la pacification de son royaume, et ne perdre aucune occasion de rétablir la paix par tous les moyens honnêtes possibles : « Je ne m’y feusse rendu si facille a l’accorder n’estoit que jespere que ce sera un acheminement a la paix laquelle je ne perdray poinct l’occasion de l’acquerir, et la rechercheray par tous les honnestes moyens que je pourray». Il l’informera des évènements qui en découleront.

Henri IV. Signature autographe

Louis Chasteigner de la Roche-Posay (1535-1595), baron de Malval, seigneur d’Abain ou d’Abin, fut un ami intime de Montaigne qu’il reçut à Rome et qui le cite dans son Journal de voyage en Italie comme « gentil home studieus et fort amy de longue main ». (Œuvres complètes, Bibl. de la Pléiade, éd. 1962, p. 1206). Il étudia sous Adrien de Tournébur, Jean Dorat, poète et professeur du Roi, et Scaliger. Après des missions diplomatiques en Italie et à Malte, il embrassa le parti des armes sous le titre de seigneur d’Abain. Il se trouva en 1567 à la bataille de Saint-Denis, à celles de Jarnac et de Moncontour en 1569, au combat de la Roche-Abeille, au siège de la Rochelle en 1573 et à plusieurs places tenues par les Huguenots. Charles IX lui octroya la charge de Gentilhomme ordinaire de sa Chambre. Considéré comme homme de confiance par Catherine de Médicis, il accompagna le duc d’Anjou en Pologne ; passant par l’Allemagne, il fut député vers les Archevêques de Trèves et de Pologne et les Electeurs de l’Empire. Après la mort de Charles IX, Henri III l’envoya à Rome auprès du pape Grégoire XIII, où il résida comme ambassadeur durant cinq ans. A son retour, il fut envoyé visité les provinces du royaume comme député du Conseil d’Etat et fut créé Chevalier de l’Ordre du Saint-Esprit ; il en reçut le collier des mains du Roi, aux Augustins de Paris, en 1583. Il servit glorieusement pendant toute la guerre d’Henri III contre les Ligueurs. Après la mort de ce prince, il reconnut pour son légitime souverain Henri IV, qui lui avait donné le Gouvernement de la Haute et Basse Marche, et qu’il servit avec zèle. Il mourut à Moulins, âgé de 60 ans, le 29 septembre 1595, à son retour de Bourgogne, où il avait accompagné Henri IV qui avait livré la bataille de Fontaine-Française en juin. Il aima toujours l’étude des lettres, les sciences et les savants ; pour l’éducation de ses enfants, il garda pendant trente ans Joseph Scaliger qui rédigea l’épitaphe écrit sur son tombeau.

Henri IV à d'Abin.

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